Inspiré de prime abord par les formes pures, j’ai commencé à nourrir, dans la confidentialité de mon atelier, un intérêt plus appuyé pour une géométrie sous-jacente de la nature et son utilisation dans de nombreuses cultures.

Les premiers motifs géométriques basiques auraient été observés dès le paléolithique sur les stèles primitives en pierre, sur les contenants comme les urnes en terre puis sur des tissus tribaux et des lieux d’habitation. L’invention précoce de certains outils comme la règle et le compas aurait conduit à la mathématisation du motif et à sa complexification exponentielle avec l’informatique. Vera Molnar fut la première artiste contemporaine à exploiter cette prolifération dans son processus de travail.

Par schématisation, il est probable que la géométrie soit née d’une volonté de s’approprier la nature, d’en mimer la mécanique répétitive.

De tout temps, l’architecture sera le champs d’application de postulats théoriques de cet ordre. Les premiers plans de constructions, notamment dans l’Égypte ancienne, suivront des cadastres dont la géométrie est inouïe.

L’ordonnancement des formes, des plus simples aux plus complexes pourrait apparaître comme une hiéroglyphie du visible, une réduction de la nature. Peu avant sa mort, Paul Cézanne adressait à Émile Bernard ses réflexions sur la géométrie perceptive ; « Tout s’ordonne dans la nature en suivant l’alignement de cônes, de cylindres et de sphères... »

Les formes polygonales découleraient par exemple de l’observation des cristaux, les hexagones des nids d’abeille, les fractales viendraient des fleurs, les rhombes des écailles de poissons, le damier des cassures transversales de fragments d’ivoire...

L’astrophysicien Jean-Pierre Luminet affirme que Kepler, dans un petit traité de 1610, « L’Étrenne ou la neige sexangulaire », révélait déjà cette articulation répétitive. Il suggéra aussi que la structure de certaines formes mimait le principe mathématique des « stellations », c’est-à-dire que la nature réalise d’elle-même des empilements et des emboîtements parfaits. C’est le cas de certaines fleurs comme le crassula.

Mais surtout, Luminet prétend que Kepler entrevit les principes sous-jacents de symétrie qui président à l’ordonnancement du monde , sur toutes les échelles de grandeur, depuis les cristaux et plus tard les cellules et les molécules, jusqu’aux orbites planétaires.